Environ une semaine avait passé. Une semaine de canicule, où Kazuma se rendait la plupart du temps dans la forêt, juste après les cours. Là-bas, il s'était construit une petite cabane avec les branches au sol, avec quelques feuilles de palmiers. Le jeune homme y passait ses nuits, en compagnie des pokemons alentour, dont il se lia d'amitié avec certains, comme Keuneutor, Aspicot, Charmillon, Sevipere, et bien d'autres encore. Tout les soirs depuis les retrouvailles avec la demoiselle, il se réfugiait là, dans son monde à lui. Un monde qu'il connaissait vraisemblablement par cœur, un monde comme chez lui. Un jour, un Pokemon affaibli arriva dans son refuge. Il s'était sûrement fait attaquer, par quelqu'un d'autre, comme un dresseur écervelé qui s'entraînait. Le jeune homme s'en occupa tout un soir, mais il lui fallait une guérison, au plus vite. C'est ainsi qu'il grimpa sur son Shaofouine, courant vers la boutique Pokemon la plus proche, et la seule de l'île. Kazuma n'avait pas revu Kiies depuis, et ne comptait pas la revoir de ci tôt. C'est ainsi que le dresseur poussa la porte de la boutique, avant de se poster au comptoir, dépassant la file. 

« Une... Guérison s'il vous plaît ! Vite un Pokemon est malade ...! Hu-Uh...
- Cela fera trois mille Poké, jeune homme. 
- Vous... Hu-Uh... Vous vous foutez de moi !? J'ai que 2000 poké en poche, moi... Je suis pas riche Uh-Uh...  
- 3000 poké ou rien, monsieur. »

Kazuma s'apprêtait à enlever le nez du vendeur, sauf que Shaofouine lui donna une claque avant. Un petit message court que le dresseur comprenait parfaitement. Le jeune homme tourna les talons, refusant d'amener le Pokemon à l'infirmerie. Ce Pokemon était sauvage, après tout. Kazuma voulut sortir de la boutique, mais il s'arrêta brusquement. Visage familier... Juste à côté, assis sur un fauteuil roulant. Pas de doute, c'était bien elle. Sauf que tout ce qu'il pensait se réalisait à l'inverse. Super. Une envie torride le dévorait, une envie humaine. Une envie de lui faire la bise, Ect. Néanmoins, il passa devant elle pour aller chercher en rayons quelque chose de moins cher, qui aurait les mêmes effets.

Une semaine. Longue comme courte, ça restait une semaine... Et pendant une semaine, la seule chose que Kiies avait faite c'était des courses en fauteuil roulant avec Lux ou des explorations sous-marines avec Lanturn, son nouvel ami. Elle évitait toujours ses Pokémon qui sûrement vagabondaient plus loin dans l'île. Les buissons devenaient de moins en moins fructueux et il fallait que Kiies nourrisse les deux créatures qui l'accompagnaient durant la semaine. Ainsi rendue à la boutique Pokémon, parfois aidée par-ci par-là par des gens assez aimables dans la rue, eux voyant que ses mains n'allaient vraiment pas bien, elle arriva à la boutique et chercha tranquillement ce qu'elle voulait.

Elle voulait éviter de voir Kazuma, parce que la petite Kiies des bacs à sable boudait toujours et que la grande Kiies n'était pas assez mature pour la faire taire. Pourtant, il fallut qu'il entre dans cette boutique. Un peu pressé apparemment et avec à peu près rien sur lui, mais il était quand même là. Peut-être l'avait-il remarquée, peut-être pas mais ce n'est pas elle qui irait vérifier. Le sac de baies sur ses genoux, elle fit rouler ses roues mais s'arrêta un moment, pas pour réfléchir mais plutôt pour se résigner... Elle sortit de sa poche un porte-feuille et regarda ce qu'il y avait dedans... Pendant son voyage vers sa région natale, elle avait récupéré son argent de poche, l'argent de ses parents mais aussi tout l'héritage familial qui lui revenait... Bref, elle avait un beau paquet de fric dans son porte-feuilles et elle n'avait rien à acheter pour le dépenser. Décidément, la vie était-elle aussi mal faite ?

Elle roula vers le rayon duquel revenait Kazuma et prit une guérison, à contre-coeur peut-être mais en tous cas, elle l'aura réellement prit... De toutes façons, même s'il prend un autre article, rien n'est plus efficace, alors autant soigner complètement. Elle s'avança vers la caisse, où tout le monde la laissait passer, peut-être par politesse au vu de son handicap... Elle déposa le sac de baies et la guérison sur le comptoir et reprit son portefeuilles.

«5800 Poké, s'il vous plait.»

Elle sortit l'argent et le tendit au vendeur qui lui fit simplement un sourire, en regardant le contenu du porte-feuilles de la demoiselle. Il fit une simple remarque comme un "On ne perd pas son temps, je vois" presque pour insinuer qu'elle gagnait sa vie en étant une prostituée... Oui, bien sûr, Kiies, une pute... Elle ne fit même pas attention à la remarque et reprit les articles, lançant la guérison à Kazuma, sans un mot... Kiies était encore plus silencieuse qu'avant... Mais la raison est bien différente ces temps-ci.

Une belle guérison de fit rattraper au vol par le jeune homme brun, qui observait d'un air glacial la concernée. Pourquoi lui avait-elle donné cette fichue guérison ? C'était  une mauvaise idée. Quelque chose qu'il avait apprit, c'est qu'il fallait être redevable envers les autres. Hors cette fois-ci, il se demandait ce qu'il allait pouvoir faire pour elle ; car il faut avouer que le dresseur n'avait pas très envie de venir vers elle. Pas très envie... Pour plusieurs raisons... Il en avait déjà mare qu'elle s'enfuit à chaque fois, bien que là la demoiselle n'irait pas bien vite, et aussi, il détestait avoir peine des gens. Pour lui, la jeune fille l'avait cherché. Donc en soupirant, il grogna en lançant un : « J'avais pas besoin de ton aide . » avant de se diriger vers elle. L'aigle devait faire quelque chose en retour ; la rembourser -bien que son porte-monnaie soit à bloc- ou encore la pousser pour qu'elle aille quelque part. Soupirant, le dresseur sortit de la boutique, poussant la chaise roulante de Kiies dehors. Petite fille qui boude ? Plus pour longtemps. 

« Où je t'emmène ? ... »  

Le dresseur mît sa guérison dans la poche, tandis que Shaofouine rentrait dans sa pokeball. Cette dernière ne manqua pas de murmurer quelques phrases incompréhensibles à Kazuma, comme si il la comprenait totalement. Ce qui n'était pas faux non plus. Le ton qu'avait prit le jeune homme se voulait aimable, remarque il n'avait pas trop le choix. Le Nirondelle blessé attendrait trente minutes de plus... Une excuse vraie marcherait toujours.

Ce qu'elle avait fait n'était ni par dépit ni par pitié mais réellement à contre-coeur. Elle n'avait aucune envie de lui lancer cette guérison, ou en tous cas, la boudeuse ne le voulait pas. La colombe, par contre, aura réellement jeter cette guérison par bon sens et peut-être même par pure gentillesse... Parce qu'elle rend service quand ça lui est possible et non-dénigrant, ça l'amuse, dirait-on. Et il est clair qu'elle est sûrement plus attachante que la boudeuse et pourtant moins appréciée, car la boudeuse est une manipulatrice et la colombe est franche. Voilà ce qui fait toute la différence. Quand elle fut presque dehors, elle n'eut plus besoin de ses mains pour se déplacer car Kazuma venait la pousser... Lui rendre un service donné ? Peut-être... Mais elle n'a jamais demandé quoi que ce soit en retour, pourtant...

«Où je t'emmène ? ...»

Kiies leva la tête vers lui et resta pensive quelques secondes. N'avait-il pas un Pokémon blessé ? C'était pourtant pour ça qu'il était allé chercher une guérison, ce que songea la dresseuse. Après tout, Lux et Lanturn avait besoin de manger mais ce n'était pas urgent, ils avaient juste un peu faim, ils n'en mourraient pas avant quelques jours. Alors pourquoi ? Pourquoi est-ce que Kiies passait avant le Pokémon blessé ?

«Tu as un Pokémon qui attend une guérison, t'occupe pas de moi, je sais me déplacer...»

Ou en tous cas à moitié si on suppose qu'à chaque fois qu'elle se déplace elle s’abîme les mains...

«Tu as un Pokémon qui attend une guérison, t'occupe pas de moi, je sais me déplacer...»

C'était vrai. C'était sûrement vrai. Un Pokemon attendait... Mais depuis combien de temps ? Une heure, pas plus... Alors que Kiies, elle, ça faisait un peu plus d'une semaine qu'elle se tuait les mains à chaque fois qu'elle avançait. Kazuma le savait, chose pour laquelle il fit passer la jeune fille avant. Ce n'était sûrement pas la seule raison... Mais le dresseur se persuadait le contraire. Toujours en poussant la chaise roulante sans vraiment d'envie, il continuait de marcher sans but, dans la galerie marchande. Assez lentement, pour ne pas se tromper de chemin ... C'était flou dans sa tête, même si il ne voyait pas trop pourquoi. La détresse non-prononcée de Kiies l'irritait plus que l'idiot de dresseur qui avait osé affaiblir un pokémon dans le but de s'entraîner. C'est ainsi que Kazuma lui répondit, d'un ton toujours froid, celui habituel... Enfin habituel pour quelqu'un qui a reprit ses nuits en forêt. 

« Tu sais peut-être te déplacer... Mais pas indemne... Le Nirondelle peut attendre, cela ne fait qu'une heure qu'il a été attaqué par un abruti ... Hu-Uh... »  

Ce fut donc avec un soupir qu'il marchait tranquillement vers les autres boutiques, sans vraiment regarder. Il se contentait de réfléchir à celle qu'il était en train de pousser, en se disant que c'était bien trop évolué pour lui. Une chaise roulante, avant Kiies, ça n'avait jamais entravé son esprit. Jamais. Une petite vie isolée, les fauteuils qui roulent n'avaient pas leur place, à moins que cette vie ne soit basé sur un handicap. Lentement, il se pencha au niveau de la tête de la demoiselle pour la regarder. Pas de sourire sur son visage bronzé, aucune expression dans ses yeux noirs ébènes. Na. Il prit la parole, plus sérieusement, avec un ton amical. Enfin qui se voulait amical... 

« Donc, où je vous conduis mademoiselle ? »

«Tu sais peut-être te déplacer... Mais pas indemne... Le Nirondelle peut attendre, cela ne fait qu'une heure qu'il a été attaqué par un abruti ... Hu-Uh...»

Nirondelle. C'était un Nirondelle qui s'était fait attaqué. C'est drôle car à peine quelques heures auparavant, Kiies avait engagé un combat avec Lux contre un dresseur disons... particulier. Il avait bel et bien attaqué le Nirondelle mais l'avait gardé et le mit comme enjeu du combat. "Si tu me bats, je le relâcherai"... Qui aurait cru que l'oiseau s'envole et aille atterrir dans les bras de Kazuma ? Kiies fixa ses jambes, le regard perdu et les pensées vagabondant on-ne-sait-où. Elle soupira, pensant qu'avant... même s'il était tout aussi froid, Kazuma était moins désagréable envers elle... Peut-être compréhensible, mais pas pour elle.

«▬ Donc, où je vous conduis mademoiselle ?
▬. .. Attends. Tu m'évites pendant une semaine, tu me regardes comme si j'étais ta pire ennemie et après tu vas encore me dire qu'un Nirondelle passe après mes mains abîmées ?»

Elle soupira. De toutes façons, ça ne servait à rien, elle n'arrive de toutes façons jamais à le comprendre... Pourquoi ça changerait aujourd'hui ?

«Le lac. Deux amis m'y attendent...»

«... Attends. Tu m'évites pendant une semaine, tu me regardes comme si j'étais ta pire ennemie et après tu vas encore me dire qu'un Nirondelle passe après mes mains abîmées ?»

Bon, ok, elle avait pas tord... Sauf que Kazuma ne le voyait pas comme ça. Il ne le voyait pas du tout comme ça. C'était normal, après tout, ces deux âmes n'arrivaient pas à se comprendre. Sauf que Le dresseur ne l'avait jamais regardé comme sa pire ennemie. C'était un air froid naturel, qui contrastait avec sa manière d'agir... Sauf qu'elle ne savait pas ce qu'il faisait depuis une semaine. La demoiselle n'en savait rien. La jeune fille ne connaissait rien aux idées qui avaient germées dans l'esprit de l'aigle cette semaine. Ceci dit, Kazuma ne savait rien non plus des pensées et du voyage détaillé de la colombe envolée. Il n'y avait rien compris. Presque rien. Ça n'arrosait pas son esprit plus que ça. C'est comme si il passait toujours à côté de la plaque. 

« Je ne t'ai pas évité, tu ne m'as simplement pas cherché hu-Uh... »  

La demoiselle venait de soupirer. Un soupir banal, comme les autres, un soupir que Kazuma faisait très souvent. Ils étaient tellement différents que pouvoir comprendre l'autre semblait impossible. Pourtant le jeune homme cherchait en vain à essayer de la comprendre... Tout ça par ce qu'elle n'était pas comme "La masse". Kazuma commençait à se lasser de lui courir après, pour la voir partir dans une autre direction. Kazuma avait sûrement essayé de voir si elle, elle avait eût l'occasion de le suivre... Voir si elle l'avait vu en premier... Si elle lui adressait la parole en premier. Tout ça ne s'était pas réalisé, pas encore. Peut être était-ce par ce qu'elle ne voulait pas, ou alors simplement qu'il était trop rapide... Mais faire semblant de ne l'avoir pas vu était évidemment impossible. Une seule fois, il y a un mois, elle était venu vers lui... Sauf que ça s'est mal terminé. C'était aussi peut être pour ça qu'elle ne venait pas... Qui sait... 

«Le lac. Deux amis m'y attendent...»

C'est ainsi que le jeune homme se redressa pour la pousser en direction du lac. Assez rapidement, quand même, car il souhaitait s'éloigner au plus vite de la ville. Une fois sur la plage, il ralentit, en regardant dans le vide, devant lui. Juste des souvenirs douloureux revenaient, comme celui de venir tout les soirs au port plus loin, se dégommant les fesses sur le bois rempli d'échardes... Sans voir que des bateaux vides de monde arrivaient, lui demandant si il voulait monter. De nombreuses fois le dresseur avait dit non, de nombreuses fois il avait voulu y monter...

«Je ne t'ai pas évité, tu ne m'as simplement pas cherché hu-Uh...»

Quand elle le cherchait il n'était pas content et voilà qu'il demande à ce qu'elle le fasse... Fallait savoir. Peut-être que le mécontentement était une bonne chose ? Ou alors que ce n'était qu'une impression pourtant bien flagrante... Mais elle n'avait rien à dire d'autres et ainsi il la conduit... A la plage ? Elle tourna la tête vers la mer puis la releva vers Kazuma. Du regret ? Peut-être, peut-être pas. Souffrait-il ? Elle ne pouvait pas savoir. Pourtant, à ce moment-même, elle se sentait mal... Elle baissa la tête et prononça des mots... qu'elle n'aurait peut-être jamais prononcé en temps normal. Car elle n'était pas du genre à s'excuser, surtout quand ça en valait la peine.

«Je... Je suis désolée. A cause de moi ton regard a changé... Et ce regard... Tu n'as pas l'air de l'apprécier...»

Elle n'avait plus le temps de dire un mot de plus qu'une petite tache jaune se rapprocha d'eux. Lux était venu en courant, à son habitude en interrompant toujours le bon moment et tira sur la main de Kiies, voulant apparemment lui demander de se dépêcher de retourner au lac.

«... Lux, calme-toi, si vous avez si faim je te donne le sac et tu peux aller en apporter là-bas, tu sais...»

Il fit un signe négatif de la tête et tira encore sur la main de Kiies, faisant des gestes pas vraiment évidents à comprendre... Elle fronça les sourcils et baissa la tête... Apparemment, elle avait compris.

«Je suis désolée Lux. J'aurai pas dut vous laisser seuls... Mais je te promets qu'on va le retrouver...»

«Je... Je suis désolée. A cause de moi ton regard a changé... Et ce regard... Tu n'as pas l'air de l'apprécier...»

Comment pouvait-elle s'excuser ? La demoiselle aurait sûrement pût partir quand elle voulait dans un bateau pour tuer sa mère. Elle aurait pût le faire avant leur rencontre. Elle aurait pût le faire longtemps après avoir fini ses études. Elle aurait pût lui demander de venir. Sauf que rien ne s'est fait, car Kazuma avait gardé le silence... Un silence lourd d'un Geek concentré sur son MMorg. Sur son bon vieux jeu installé sur son Pc depuis longtemps. Trop longtemps même. Déjà arrivé au lvl 99, déjà fait parti des GM, déjà recommencé jusqu'à tout connaître par cœur, le silence d'un Geek qui cri dès que son personnage est K.O. . Car à la base, le dresseur n'était rien de plus qu'un jeune petit Geek resté enfermé pendant trop longtemps dans sa chambre face à son PC. Son imagination était grande, du coup. Reproduisant les gestes de son personnage, vite il avait apprit à se battre. Sauf que cette époque était passée. Plus de 7 ans qu'elle était passée.  

Le regard ? Celui d'un homme sur une île déserte qui attendait l'arrivée d'un bateau. Celui de quelqu'un resté trop longtemps à attendre. Un regard vide, sans même plus savoir ce qu'il cherche, en oubliant ce qu'il est. Sans savoir qui il est. Apprécier ne faisait pas vraiment partie de son vocabulaire. Non, plus maintenant. Apprécier des moments seul après avoir trouvé une vie parfaite. Résister à l'alcool après en avoir bût tout les jours durant deux mois... Non. Kiies avait été un jour une sorte de drogue, un truc qui le faisait sortir de son univers à lui. Sauf qu'il y avait replongé après son départ. Le rayon de soleil est parti, laissant place aux nuages... 

À peine avait-il écouté la conversation qu'il accéléra le pas, mais sur le sable, ce n'était pas vraiment évident de pousser cette chaise... Shaofouine sortir de sa pokeball, à la demande du dresseur, avant que celui-ci prenne Kiies sur son dos, comme avant... Kazuma se mît à courir vers le lac, yeux mi-clos. Le vent sur son visage le faisait sortir un peu de sa rêverie. Shaofouine, quand à elle, portait la chaise roulante d'une patte, trottant derrière, à son rythme. Arrivés au lac, Kazuma s'arrêta, sans un mot. Sa quête était déjà finie. Il allait encore fuir. Ils allaient encore se séparer. À part si un élément perturbateur lui bouchait encore la route vers Nirondelle...

Ainsi donc arrivés au lac, Kiies regardait devant elle sans voir Lanturn. Où était-il passé ? Elle ne savait pas. Mais une silhouette qui ne lui était pas inconnue se montrait quelques mètres plus loin devant elle. Une voix masculine provocante et presque moqueuse sortait de cet être qu'elle semblait mépriser au plus haut point. Grande taille, cheveux bruns et yeux bleus, des épaules larges et un sourire ironique... Un sourire presque désagréable mais à la fois très significatif. Kiies fronçait les sourcils, c'était certain ; elle détestait cette personne.

«Je vois qu'elles te font mal... Mais je peux t'en débarrasser, de ces jambes que je t'ai brisées, tu sais...»

La colombe baissa la tête et serra les dents. Il venait tout de suite de dire que c'était de sa faute si elle était privée d'une grande partie de ses mouvements... Il aurait pas put se taire ? Kiies releva la tête.

«Je ne suis pas là pour accepter ton marché mais pour récupérer le Pokémon que tu as retiré à la nature et à sa famille.»

Lanturn, bien évidemment. Allez savoir de quel marché elle parlait, mais en tous cas, ça ne semblait pas lui convenir pour qu'elle en parle avec tant de mépris... Oui, elle méprisait tout ce qui pouvait concerner cette personne peut-être un peu plus âgée qu'elle, de près ou de loin.

«Je vois qu'elles te font mal... Mais je peux t'en débarrasser, de ces jambes que je t'ai brisées, tu sais...
- T'as pas intérêt à la toucher une seconde fois...» susurra-t-il entre ses dents, s'en pouvoir s'en empêcher. 

Une seule phrase. Une seule phrase qui allait sûrement attisait le feu qui brûlait dans l'esprit de l'aigle. Un feu dévastateur, à vrai dire. Shaofouine arriva, juste à temps pour Kiies, qui venait de se faire déposer du dos du jeune homme, heureusement pour elle,elle atterrit sur la chaise. Cet homme, c'était sûrement quelqu'un de fort, à ce qu'il avait pût comprendre. Kazuma se retint très fortement pour ne pas faire la même bêtise que la colombe, ou une totalement différente. Poings serrés, il resta simplement debout, devant la demoiselle, en maîtrisant son souffle. Le petit homme de la forêt aurait sûrement besoin d'un calme exemplaire et contradictoire à sa nature pour ne pas s'élancer et faire quelques prises sur cet individu qui avait osé faire du mal à Kiies. Il n'était même pas sur d'être écouté si il parlait. C'est ainsi qu'il s'avança, tranquillement, près du lac, vers l'assaillant. Shaofouine s'était mise devant la dresseuse, pour la défendre au cas où... Le jeune homme était confiant ... Peut être trop, même. Il se sentait protéger dans son propre environnement... Mais une phrase de Kiies le mettait en doute : “ ...S'y croire chez soi...”  À présent, Kazuma attendait que l'action se déroule,prêt  à être aidé par ses deux amis qu'il avait fait sortir de sa pokeball. Les deux pokemons, étaient bien dans les profondeurs du lac. 

Tranquillement, il alla s'appuyer contre un arbre, à distance égale de Kiies et l'individu. Kazuma avait appris à maîtriser sa colère, et quelques autres de ses sentiments. Ce qui lui permettait de ne pas péter un boulon à chaque fois. Intervenir que dans les situations critiques, mais là Kiies s'en sortait bien toute seule, pour l'instant...

Le regard de la personne en face était perçant et fixait Kazuma avant de reposer le regard sur Kiies. Les deux regards étaient différents, même si venant de la même personne. Celui vers Kiies était peut-être plus doux et plus moqueur que celui vers Kazuma était plus froid et destructeur... Lui en voulait-il ? C'était certain... De quoi ? La question ne se posait même pas.

«Après m'avoir rendu esclave de tes caprices, c'est à lui que tu t'en prends ?»

Kiies baissa la tête. C'est vrai, il a été longtemps une personne qui lui courait après. Il a couru après la colombe trop longtemps et elle s'est lassée. C'était ce qui s'était passé. Elle l'avait prit à ses pieds par seul petit profit... Mais Kazuma était différent. Trop différent pour être comparé, d'ailleurs.

«Tu as peut-être été à mes pieds voire même en-dessous... Mais ne compare pas Kazuma au pitoyable moineau que tu étais... Il n'est pas comme toi.»

Vexant, ça c'était clair... Mais peut-être pas tout à fait faux. C'était justement ça qui était douloureux.

«▬ Et qui est-il alors ?
▬ ... Un rêve. Qui me quitte peu à peu sans même que je puisse lui en vouloir... Toi tu n'étais qu'un moineau courant après une colombe et lui privant de ses pattes pour mieux l'attraper... Mais ce que tu voulais attraper c'était son coeur et pas son corps, imbécile...
▬ ... C'est vrai. Mais la vengeance finit toujours pas tomber un jour.»

Il fit un signe de la main et un Guerriaigle arriva, près à charger sur Kiies. Celle-ci regardait le Pokémon s'avancer vers elle, sans rien pouvoir faire. Même le mouvement lui était impossible.

Kazuma envoya un regard glacial vers l'individu, avec un sourire narquois. Un des regards noirs qui faisaient fuir la quasi-totalité des élèves ici. Un de ces regards qui poussait les gens à s'écarter du chemin de Kazuma... Ou pas. Dans ces cas là, c'était simple. Trop simple..

«...C'est vrai. Mais la vengeance finit toujours pas tomber un jour.»

C'était trop. Un beau Pokemon, aveuglé et utilisé comme une machine, venait de foncer sur Kiies... Sauf que cela ne se passa pas comme ça. Le jeune homme avait déjà claqué des doigts. Ses pokemons n'étaient malheureusement pas aveugles. Pas encore. Shaofouine écarta Kiies de la trajectoire du Pokemon vol, laissant ses chers acolytes s'en occuper... Millobelus sortit rapidement des profondeurs du lac, lançant un bel hydrocanon en plein sur la tête du grand aigle... Avant que Loklhass le suive. Un beau laser glace congela donc le Pokemon sur place, le laissant tomber sur le sol. Un sourire satisfait sur les lèvres de Kazuma, qui les félicitait du regard. Une belle surprise leur sera offerte après. Pour l'instant, le jeune homme se concentrait sur le dresseur en face de lui, un regard sombre s'affichait, disant clairement qu'il ne savait pas à qui il avait à faire. 

« ... Hu-Uh... Dégage de notre chemin, à moins que tu veuille l'ile entière contre toi... J'ai un ami cher à soigner là, alors va droit au but. Sache que Kiies n'est pas un objet, si elle ne t'as pas choisi tu ne peux t'en prendre qu'à toi même... Hu-Uh... »  

Un ami cher. Oui, un Pokémon était toujours un ami cher pour Kazuma. Ou en tous cas, tous les Pokémon qui n'étaient pas comme le Guerriaigle gelé. Kiies soupira. Encore une fois, elle était inutile, encore une fois, elle dérangeait Kazuma. C'était toujours elle qui, sur le côté, était sans défense et toujours elle devant qui il fallait se mettre pour ne pas la perdre. C'était la dure réalité, mais dans son état, elle n'aurait de toutes façons rien put faire. Le garçon devant eux semblait de moins en moins amical et sortit une Pokéball qu'il lança à un autre de ses Pokémon ; Vaututrice. Pokéball que le Pokémon n'attrapa pas car c'est, bien qu'en se faisant bien mal, Kiies qui sautant de sa chaise, attrapa l'objet sphérique et atterrit au sol. De toutes évidences, c'était Lanturn dans la Ball. Les jambes complètement craquées, le derrière au sol et la Ball contre sa poitrine, Kiies fixait d'un air froid le garçon qui soupira.

«Tu penses vraiment que c'était nécessaire de t'abîmer encore plus ? Bah... Fais comme tu veux. ~ Mais tu sais très bien que je serais... toujours là.»

Et il partit sur le dos de Vaututrice, tranquillement. Kiies le fixa partir sans réagir. Elle ne l'aimait vraiment pas, décidément. C'était une très mauvaise proie, qui ne se laissait pas abandonner... Et en plus rancunier. Oui, réellement, elle ne pouvait pas supporter les mauvaises proies... Surtout quand celles-ci lui brisent les pattes, mais ça, c'est secondaire à la limite.

« C'est comme ça que tu abandonne tes partenaires ? ... Hu-Uh... »  

Le Loklhass envoya un jet de glace, pour congeler le dos du dresseur. Ceci fait, Milobellus se joint à la partie, en éclaboussant un grand coup l'individu. Kazuma courra vers eux en riant presque ; il les caressa, tout en les félicitant. Ceci fait, il se dirigea vers le Guerriaigle gelé... 
« Shao', je te laisse le plaisir de dégeler ce pauvre Pokemon avec un pied-sauté ~ » Shaofouine utilisa donc cette attaque pour briser la glace ; le Pokemon en question sortit, encore étourdi par le fait qu'il soit resté congelé. Kazuma le caressa aussi, car personne n'échappe à la règle. Très vite, il fit ami-ami avec le Pokemon ; après avoir bien chouchouté ses amis, il se tourna vers Kiies, un air froid sur le visage ; on aurait put croire un instant qu'il était inquiet. 

« Une pokeball ne se brise pas en tombant. Tes jambes oui. Alors commence pas à sauver une pokeball en te jetant dessus. Même si la ball aurait eut quelques chocs, ton ami n'aurait rien senti... Ou très peu. »  

Le jeune homme la prit dans ses bras, avant de la remettre sur sa chaise. Dans les profondeurs de la forêt, Lucario ressortit, Nirondelle sur l'épaule. Le Pokemon avait l'air mal en point... Enfin plus qu'avant. Kazuma s'empressa de lui appliquer la guérison, lui bandant l'aile droite. Un léger sourire éclaira son visage, en prenant l'oiseau sur sa main. 
« Désolé Nirondelle... Désolé Lulu... Je le referai plus...Hu-Uh... »

«Une pokeball ne se brise pas en tombant. Tes jambes oui. Alors commence pas à sauver une pokeball en te jetant dessus. Même si la ball aurait eut quelques chocs, ton ami n'aurait rien senti... Ou très peu. »

Ainsi de retour dans sa chaise roulante, Kiies regardait Lucario ramener le Nirondelle blessé. Nirondelle que Kiies connaissait, étant donné que c'est elle qui l'avait relâché alors qu'il était enfermé dans une Ball d'un dresseur peu attentionné... Autant dire qu'il maltraitait le pauvre oiseau sans dépit. La colombe baissa la tête, regardant alors la Pokéball de Lanturn entre ses mains... Elle ferma les yeux et soupira. Elle savait qu'il ne sortirait pas, en croyant que ce n'était pas la colombe mais le dresseur qui l'avait enfermé qui souhaitait le faire sortir... Elle mit alors l'objet sphérique dans son sac et releva la tête vers Kazuma... Lui en voulait-il ? Pourquoi aurait-il une raison de lui en vouloir ? C'était ses jambes et elle-même qui risquait de les briser, pourquoi était-il mécontent ? Ce n'était pas comme si ça l'affectait physiquement...

Elle n'osait rien dire, peut-être par peur d'encore faire une bêtise. Après tout, tout ce qu'elle faisait était vu comme une bêtise, jusqu'à présent... Alors autant ne rien faire et encore plus ne rien dire. Les yeux rivés au sol, un air de rêveuse et des pensées dans tous les sens, elle ne savait plus où se mettre, entre un aigle qui disparaît, des Pokémon qui la cherchent sûrement mais qu'elle ne veut toujours pas voir et des jambes brisées, c'était à peine si elle savait qui elle était. Mais ce qui la préoccupait le plus à ce moment-là, c'était bel et bien Kazuma. Elle pensa qu'il la détestait sûrement, qu'elle était réellement ennuyante, à toujours attirer les problèmes... Oui, c'est ce qu'elle pensait. Et peut-être la raison pour laquelle elle n'osait pas briser son propre silence...

Être toujours énervé. Voilà l'impression que donnait Kazuma, toujours là avec son air froid, du genre que tout ce qui l'entourait n'avait aucune importance pour lui. Cet air là se dissipait avec ses pokemons ... Mais pas avec les autres humains. C'est comme si il restait enfermé sur lui-même, de peur que son père refasse surface pour le juger et le battre... Ou pire encore, qu'il le sépare de ses Pokemons, ou même qu'il découvre son secret dans son Pc... Que pensait donc Kiies ? Elle devait encore se faire des fausses idées à son sujet... Ou même se poser des questions sur ce qu'il avait fait il y a un mois et plus. Des actes auquel il avait eut tout le temps de réfléchir. C'est ainsi qu'il s'assit les pieds dans l'eau, de dos à Kiies. Il commença donc ses petites excuses et explications... 

« Uh-Hu... Tu sais... Je suis désolé pour l'autre fois... Quand t'es partie... Je... Je voulais juste m'assurer que tu revienne... »  

Ce n'était certainement pas ce qu'une fille comme tout le monde aurait voulu entendre. Certainement pas. En attendant, à part dans son époque floue de la maternelle, il n'avait jamais embrassé personne. Avant, il n'était pas comme ça... Avant, c'était quelqu'un de très attentionné, qui pleurait facilement, mais qui souriait bêtement le reste du temps. Timide, les gens venaient vers lui, mais il s'intégrait vite...alors que maintenant... Ce n'était plus qu'un simple rebelle qui se frayait un chemin de trois mètres dans la foule. Sans amis humain. Enfin... Presque si on considérait Kiies comme une amie. Pour lui, Kiies c'était Kiies. Juste un mystère, une équation à résoudre. Sauf qu'il ne faut pas que cette équation se fausse par des accidents... Ce qui c'était déjà produit. 

« Et aussi... Si cette semaine, je ne t'ai pas cherché... C'est par ce que j'étais ailleurs. J'avais besoin de retourner dans mon territoire... Pour réfléchir et me sentir mieux. Uh-Uh... Sauf qu'à cause de toi, j'ai fais des cauchemars les nuits... »  

Son Loklhass s'était approché, pour venir le remettre d'assaut. C'est vrai qu'après ces excuses froides et sans saveur, son Pokemon voulait voir un sourire sur le visage de son dresseur... Ce qu'il fit peu après, pour le rassurer.

«Uh-Hu... Tu sais... Je suis désolé pour l'autre fois... Quand t'es partie... Je... Je voulais juste m'assurer que tu revienne...»

Pourquoi ? Qu'est-ce que ça lui aurait apporté ? Et si jamais elle n'était pas revenue, que se serait-il passé ? Rien du tout. Il n'y aurait rien eu. Il l'aurait oubliée et ça aurait été fini. Les oiseaux ne se connaîtraient même plus, comme s'il ne s'étaient jamais vus. Comme s'ils s'étaient juste aperçus tels des passants dans une rue qui se regardent et s'oublient. Et il aura été trop tard pour se comprendre... Pourtant, Kiies est revenue, elle s'est envolée, a disparu et est revenue comme un oiseau migrateur mécontent de ce qu'il avait trouvé de l'autre côté. Elle était là, c'était prévu, il n'y avait aucune possibilité qu'elle disparaisse à jamais... Tout est écrit à l'avance, tout est planifié.

«Et aussi... Si cette semaine, je ne t'ai pas cherché... C'est par ce que j'étais ailleurs. J'avais besoin de retourner dans mon territoire... Pour réfléchir et me sentir mieux. Uh-Uh... Sauf qu'à cause de toi, j'ai fais des cauchemars les nuits...»

Des cauchemars, une erreur dans une vie, une tristesse dans le coeur et une angoisse dans l'esprit. Les cauchemars n'étaient qu'un mensonge tissé de toutes pièces à partir de simples peurs, une simple angoisse qui déchire l'intérieur de la confiance jusqu'au plus profond de la lueur... Voilà ce qu'était un cauchemar pour Kiies... Et elle était la cause de ceux de Kazuma... Elle baissa la tête, honteuse d'être à l'origine de ses angoisses... Elle roula vers lui et posa un doigt sur le bas de sa nuque.

«Cet endroit est douloureux quand on est triste parce qu'on baisse trop la tête...»

Elle regarda Kazuma, même s'il était de dos, retirant son doigt et alors passant sa main sur tout le derrière de sa nuque avant de monter sur l'arrière du crâne, se trouvant un chemin dans ses cheveux...

«Mais chez toi, ce n'est pas de la tristesse. C'est de la colère. Et quand on est en colère, on pense trop, alors on a mal au crâne...»

Elle retira sa main, fixant ses jambes. Elle n'était pas triste, elle était déçue d'elle-même. Disons surtout qu'elle était rancunière envers sa propre personne...

«Même si tu sembles froid, même si ton plumage te rend inapprochable, il y a une colombe qui sait que l'aigle a mal... Et elle vient d'apprendre que c'était à cause d'elle qu'il souffrait... Alors elle s'en veut. C'est sans dire que la vision qu'elle a des cauchemars est plus qu'une épouvante qu'on lit dans des livres de contes...»

«Cet endroit est douloureux quand on est triste parce qu'on baisse trop la tête...»

Un endroit douloureux... Quel est l'endroit le plus douloureux pour lui ? Avant... Retourner dans la forêt était impensable... À présent... L'endroit le plus douloureux était sans doute le port. Ce port où, chaque soir, il venait errer tel un voyageur sans but... Aucun de ces bateaux ne lui plaisaient. Aucun de ces bateaux ne lui avait donné l'envie de monter... Celui de Kiies lui avait donné l'envie de détruire le paquebot qui arrivait. Comme une tornade, Kazuma détruisait ce qui lui bouchait le chemin... Sauf que lui n'avait jamais baissé la tête, mis à part pour regarder ses petits pokemons. Il ne comprenait pas Kiies. Il ne l'avait jamais comprise. Sa nuque n'avait pas été douloureuse... Depuis longtemps... Enfin elle l'était quand il passait trois jours entiers sur son Pc. 

«Mais chez toi, ce n'est pas de la tristesse. C'est de la colère. Et quand on est en colère, on pense trop, alors on a mal au crâne...»

Un geste de trop. Kazuma monta sur Loklhass, regardant d'un air froid son assaillante. La colère faisait partie de ses cauchemar. La déception, aussi. Le mal de crâne était à voir. De toute façon, elle ne comprenait pas. Elle ne comprendra pas. Elle ne comprendrait pas. Elle n'avait jamais compris. Alors pourquoi voulait-il qu'elle comprenne ? Pourquoi s'obstinait-il à vouloir que Kiies comprenne ? Il attendit la suite des parole de la jeune fille, qui ne tarda pas à reprendre. 

«Même si tu sembles froid, même si ton plumage te rend inapprochable, il y a une colombe qui sait que l'aigle a mal... Et elle vient d'apprendre que c'était à cause d'elle qu'il souffrait... Alors elle s'en veut. C'est sans dire que la vision qu'elle a des cauchemars est plus qu'une épouvante qu'on lit dans des livres de contes...»

Non. Ce n'était pas qu'à cause d'elle. Elle n'avait aucune raison de s'en vouloir... Pourtant elle semblait être déçue de soi-même. Kazuma soupira, assis sur la carapace de son Loklhass. Rien de cela ne serait arrivé si Il ne l'avait jamais rencontré. Sa vie serait restée comme elle est, et ce casse-tête n'aurait jamais été créé. Toute cette attente aurait été remplacée par d'autres occupations, d'autres sourires, d'autres rires. Sauf que Kiies était là. Sauf que Kazuma voulait à tout prix résoudre l'équation qu'elle était. Pour cela, il fallait s'empêcher de s'y attacher. Car tout ce qu'on aime s'en va un jour. On se laisse abandonner et on tourne la page. Sauf que Kazuma, tant que sa page n'avait pas terminé d'être écrite, il ne la tournait pas. 

« Hu-Uh... C'est ... C'est quoi un conte ? ... »  

Bon, une question sûrement inattendue, mais qui avait retenue l'attention de l'aigle. Effectivement, dans son enfance, les histoires de chevaliers et de princesses ne se racontaient même pas à l'école. Ou en tout cas, pas des vrais contes classiques tel que La belle au bois dormant, La belle et la bête, Raiponce, Le petit poucet, Ect. Toujours cet air froid sur le visage, il avait les sourcils légèrement froncés.

Un conte. C'était une belle chose, à la base. Mais à présent, c'est juste devenu publicitaire et source de manipulation. Oui, c'était ça, un conte. Ses yeux infiniment perdu dans un vide apparent regardaient Kazuma sans vraiment le voir. Elle le fixait sans y penser, mais sans l'oublier pour autant. Elle ne réfléchissait pas, elle n'était ni pensive ni rêveuse.. A ce moment-là, elle n'était plus rien du tout, juste un oiseau qui ne retrouvait plus son chemin, qui ne savait plus à qui demander où était la route... Perdue dans une avalanche, comme morte sous une tonne de neige sans pouvoir s'en sortir.

«... Hmm... Un conte... C'est des histoires qu'on raconte aux enfants pour leur inculquer des savoirs inutiles et des connaissances stupides qui leur serviront à se soumettre à la volonté des plus grands, à être des bons moutons obéissants... Un conte, ça sert aussi à faire vendre des produits à partir d'histoires qui font rêver les petites filles sur leur balançoire...»

Elle ne parlait pas d'elle mais de Théa, à ce moment-là. Kiies a toujours été différente, moins obéissante, moins présente et aussi beaucoup moins attachante que Théa, peut-être à cause de sa flemmardise mais aussi du fait qu'elle avait la curieuse manie de ne jamais mentir et ainsi donc, de blesser beaucoup de gens en leur disant la vérité. Elle était très lucide et c'est cela qui ne plaisait pas du tout à sa mère. Elle était trop réfléchie pour être une bonne petite fille obéissante tel un chien pour son maître. Elle n'était pas comme ça, elle ne le sera jamais. Elle ne va pas en cours sauf pour y dormir, elle ne réussit pas ses examens à moins de se faire aider et elle marche à contre-sens dans le couloirs, rien que pour énerver ceux qui le remarquent... Arrogante, impertinente, appelez ça comme vous voulez mais elle ne volera jamais comme les autres... C'était impossible, pour elle.

«C'est à cause des contes un peu trop magiques et irréalistes, mettant en valeur le bien et le mal, la punition du méchant et la récompense du gentil qu'il existe plus de personnes stupides et obéissantes que de personnes lucides et intelligentes...»

Elle soupira et recula un petit peu du lac, ne voulant pas y voir son reflet. Elle se dégoûtait, à finalement n'être aucun des deux types de personnes qu'elle avait cité. Elle était trop absente et endormie pour être l'un des deux. Elle était trop différente de tout pour pouvoir s'apparenter à quoi que ce soit. Réellement, Kiies était et restera une personne étrange... Si étrange... Que ça en devient presque habituel. Ses yeux fixaient le sol, tandis que sa vision se brouillait, devenait floue et lui donnait le tournis. Non qu'elle allait tomber, elle était assise, je rappelle... Mais elle sentait encore la fatigue lui monter, et elle n'avait pas du tout envie de ça...

«... Hmm... Un conte... C'est des histoires qu'on raconte aux enfants pour leur inculquer des savoirs inutiles et des connaissances stupides qui leur serviront à se soumettre à la volonté des plus grands, à être des bons moutons obéissants... Un conte, ça sert aussi à faire vendre des produits à partir d'histoires qui font rêver les petites filles sur leur balançoire... C'est à cause des contes un peu trop magiques et irréalistes, mettant en valeur le bien et le mal, la punition du méchant et la récompense du gentil qu'il existe plus de personnes stupides et obéissantes que de personnes lucides et intelligentes...»

Un souvenir... C'était juste une source de savoir, une partie de la mémoire, quelque chose de flou qui implique la nostalgie. Ou le désir d'oublier. Kazuma ne voulait pas oublier, mais pourtant, il n'était pas nostalgique non plus. Toutes ces choses dont il se souvenait, comme certains visages sans noms, comme les cheveux châtains clair de la maîtresse, comme les coups de couteau de son père complètement saoul... Son père lui avait appris à obéir. À être un bon petit garçon obéissant et poli. Sauf que Kazuma n'était pas comme ça. C'était un animal qui s'était rebellé contre son maître. C'était un chat qui s'en aller car il n'y avait pas assez à manger. C'était un cheval qui cabrait pour faire tomber son cavalier. C'était tout sauf un petit chien qui s'asseyait quand on lui ordonner de le faire. Sauf que le jeune homme était plutôt intelligent et malicieux. Il apprenait dans les lectures que les méchants étaient toujours punis. Sauf qu'il avait décidé de faire l'inverse. Être méchant et prouver qu'il ne serait pas puni. Un léger sourire éclaira légèrement le visage neutre du garçon. Il hocha la tête, comme pour affirmer ce qu'elle disait. 

« Chacun a une place, un rôle à jouer dans le spectacle de la vie. Je ne pensais pas obtenir un rôle dont je n'avais pas l'envergure... »  

Un rôle à jouer, c'etait comme au théâtre. On lui déléguait le rôle du prince, alors qu'il voulait celui du méchant. Le résultat étant quelque chose de flou, entre le froid et le chaud. Une rafale ou bien un vent alyzé. Kazuma n'avait jamais voulu la rencontrer. Kazuma s'était répété un milliard de fois de ne pas s'attacher à elle. Kazuma s'était juré de l'envoyer à l'infirmerie au premier mot de travers... Et pourtant, il n'avait rien fait. Il avait fait l'inverse. La demoiselle l'avait rencontré. La jeune fille l'avait prit au filet. Kiies avait dit des mots de travers. Pourtant elle était toujours là, près de lui. Et il ne voulait pas que ça change. En voyant la demoiselle commençait à fatiguer, il sortit de son perchoir, s'asseyant à côté d'elle. Il fixait le lac, pensif. 

« Dis Kiies, es ce que tu te lassera et tu m'abandonnera ? ... »  

Non, il n'avait pas dit ça comme un petit chiot qui voulait rester avec sa mère. Il avait dit ça d'un ton neutre, juste pour savoir. Juste pour le savoir... Pour ne pas s'attacher d'avantages à elle. Pour espérer entendre un oui. Pour espérer qu'il pouvait décamper et ne jamais revenir... Sauf que ce ne sera pas de son propre chef. Un pressentiment. Car il savait depuis toujours que son père reviendrait le chercher. Il l'espérait...

Des rôles à jouer. Peut-être avait-il raison ou peut-être avait-il tord. La colombe se fichait de savoir si c'était juste ou non, elle y croyait, c'était l'important. Ses yeux perdus dans l'eau du lac, ses pensées volant loin dans le ciel sans jamais revenir, son esprit complètement ailleurs, l'empêchant de faire attention à ce qui passait autour d'elle. Ou du moins, jusqu'à ce que son cerveau capte cette phrase qu'elle pensait ne jamais entendre d'une personne comme Kazuma...

«Dis Kiies, es ce que tu te lassera et tu m'abandonnera ? ...»

Elle le regarda puis leva la tête au ciel. Elle n'avait rien à répondre, en fait. Elle ne pouvait pas prévoir le futur, elle ne savait pas ce qui pouvait se passer et encore moins ce qu'elle pensera dans l'avenir. Pourtant, elle savait une chose ; la réponse était négative. Elle ne voulait pas abandonner Kazuma et encore moins qu'il l'abandonne. Elle leva la main vers le ciel, un air pensif sur le visage.

«Tu sais, même le soleil, la lune ou les étoiles ne savent pas ce qui arrivera prochainement. Je ne peux rien prévoir de l'avenir, je ne peux pas savoir ce que je penserai demain...»

Elle ferma les yeux, posa ses mains sur ses cuisses, les yeux alors rivés au sol sans rien signifier, sans rien indiquer de particulier. Il n'y avait rien dans ses yeux, juste un air lunatique indescriptible, voire incompréhensible.

«Mais je n'ai pas envie de t'oublier. Même si parfois je me dis que si je m'efforce, j'y arriverai... Je n'ai pas envie. Je ne veux pas t'abandonner et je ne veux pas que tu m'abandonnes.»

«Mais je n'ai pas envie de t'oublier. Même si parfois je me dis que si je m'efforce, j'y arriverai... Je n'ai pas envie. Je ne veux pas t'abandonner et je ne veux pas que tu m'abandonnes.»

Sauf que comme toujours, quand il voulait un oui, il obtenait un non. Kazuma soupira, mécontent de la réponse. D'un certain côté, il savait qu'il allait devoir partir... Le jeune homme savait déjà qu'un jour, il allait devoir retourner de l'enfer où il venait. Il savait qu'il allait la quittait... Même si Kazuma ne voulait pas. Le dresseur n'en avait pas envie. Sauf que la vérité était bien présente. Le jeune homme savait. Il savait ce qui allait se produire. Ses cauchemars devaient être réels... Ils allaient se produire un jour. Peut être pas de la façon attendu... Mais il le savait. 

« Hu-Uh... Un jour... Je serais obligé de t'abandonner. Même si je n'en ai pas l'envie... J'y serais contraint. »  

Le jeune homme soupira, en balançant ses pieds dans l'eau du lac, le regard perdu dans le vide. Même si elle ne voulait pas, même si elle ne l'accepterait pas, Kazuma allait s'enfuir. Kazuma allait sûrement se lasser. Kazuma allait sûrement l'abandonner... À part si elle devenait un Pokemon, mais là,c'était amplement différent. Doucement, il s'allongea sur l'herbe, pour observer le ciel. Tout cela n'allait pas être du gâteau. L'abandonner ne serait pas une bonne chose... Mais il savait qu'une fois l'équation terminée, il allait peut être se lasser. Et si faut il s'enfuira avant même de l'avoir résolue... 

«Hu-Uh... Un jour... Je serais obligé de t'abandonner. Même si je n'en ai pas l'envie... J'y serais contraint.»

Différents. Ce n'était pas la différence qui faisait que Kazuma allait partir ni même la ressemblance. C'était bien la platitude du terrain sur laquelle ils se regardaient sans se voir qui faisait qu'il l'abandonnerait. C'était à cause de cela, à cause de cette répétition permanente et lassante, à cause d'un calcul trop compliqué pour être résolu, à cause de... A cause de Kiies. Elle resta immobile, les yeux dans le vide... Que pouvait-elle dire, de toutes façons ?

«On est jamais obligés, tu cherches juste un prétexte stupide pour pouvoir t'en aller... Tu es comme mon père. Tu mens pour fuir...»

Son père. Les prétextes qu'il avait trouvé pour abandonner ses filles sur cette île n'étaient pas tout à fait faux, mais pas tout à fait vrais non plus. Kiies dans son cas l'avait pris pour un énormissime mensonge et avait même commencé à se dégoûter de son paternel à qui elle s'était pourtant tellement attachée. Et maintenant, c'est en quelques mots que Kazuma venait de descendre de l'aigle au misérable renard, menteur mais futé auquel avait été apparenté son père autrefois. La dernière fois, Kiies avait alors quitté son père après l'avoir détesté et après qu'il l'ait dégoûtée à ce point... Mais cette fois, elle ne partirait pas et elle ne détestera pas non plus Kazuma. Cette fois, elle restera juste là, à attendre qu'il crève, qu'il use de son dernier souffle, pour pouvoir après regretter... Comme elle le fait toujours. Car sa vie... n'est plus qu'un grand paquet de regrets qu'elle aimerait effacer.

«On est jamais obligés, tu cherches juste un prétexte stupide pour pouvoir t'en aller... Tu es comme mon père. Tu mens pour fuir...»

Mentir... Voilà la dernière chose que Kazuma lui ferait. Jamais il n'inventerait des prétextes pour s'éloigner à jamais d'elle... Bien qu'il voulait rester, il avait conscience du futur. Il savait qu'un mail, une lettre, une personne viendrait un jour pour annoncer sa fin. Peut être qu'elle ne viendrait que longtemps après être passé à l'âge adulte. Peut être qu'elle viendrait ce soir... Personne ne le savait. En attendant, Kazuma fuyait ce jour, avec la peur qu'il arrive. Mais que fera-t-il, ensuite ? Rien... Rien du tout. Il se battra jusqu'à ce que son corps ne fonctionne plus. Il mourra peut-être célibataire, puceau, sans Pokemon, qui sait ? On ne prévoyait pas le futur. 

« Ne me compare à personne... Car vois-tu, il n'y a que la vérité qui blesse. Tu le sais sûrement mieux que moi... Mais je sais qu'un jour, ils viendront. Il viendra... Et je ne sais pas ce qu'il se passera après. »

Kazuma s'assit, en posant sa main sur celle de Kiies. Sa tête était remplie de souvenirs et de déception. La demoiselle l'avait déjà abandonné. La déception de soi-même avait dépassé la limite du suicide. Des centaines de fois, il regardait son sang couler, en se disant que chaque goutte serait le résultat d'un jour de plus... Finalement elle est revenue. Finalement il en a appris plus sur les moineaux qui lui tournaient autour. Il aurait pût être un renard qui la dévorerait toute cru. Sauf qu'il était un aigle...